Annaë et moi avions décidé de camper à côté du lac avant de faire route vers l'école demain.
La journée avait été chargée en émotion et pourtant... Pas un seul d'entre nous n'avait dit grand chose quant aux récents événements. Nous nous étions simplement échangés quelques banalités mais sans plus...

Mais pourtant je devais lui parler. De nous. Et d'elle. La première partie semblait presque très simple à côté de la seconde...
Comment lui expliquer ? "Hey je t'ai pas dit, en réalité tu peux te transformer en monstre sanguinaire, et tu as déjà failli me tuer à deux reprises..."
Non décidément, j'avais beau tourner ça dans tous les sens, rien ne me venait pour amorcer le chose en douceur. Le sujet était bien trop délicat. Mais pouvais vraiment la laisser aller à l'école sans savoir ce qu'elle était réellement ?
Bien sûr que non. Elle aussi devait sentir que quelque chose me tracassait car elle ne disait mot. Et puis finalement je tentais quelque chose...

Dis moi Ann' tes trous de mémoires...je... Tu te rappelles de certaines choses des fois ?

Pitoyable... Quelle éloquence ! -_- Elle me répondit tout de même :

Non... Le noir absolu à chaque fois... Et je ne sais même pas ce qui les provoque...

Sa voix vacillait...elle était en train de craquer même avec toutes les précautions que j'avais tenter de prendre. Normal après tout, ça devait être vraiment perturbant comme phénomène... Maintenant que j'étais lancé j'allais devoir assumer jusqu'au bout ma tentative :

Je ne pourrai jamais te rendre tes souvenirs et j'en suis désolé... Mais je peux peut-être te soulager en t'expliquant les origines de tes trous de mémoire. Tu auras le droit de me haïr toute ta vie pour t'avoir caché ça aussi longtemps, mais crois moi bien, ce n'est pas facile à expliquer... Mais j'en ai assez de te mentir, je tiens trop à toi pour continuer à le faire alors tant pis...
Tu étais sur le point de mourir de froid sur les monts Tokrystaux lorsque mon maître est moi t'avons retrouvé. Ne me demande pas comment tu étais arrivée là, moi même je l'ignore... Nous t'avons alors ramené dans notre abri pour te soigner. Fort heureusement la médecine de mon maître t'as remise sur pieds, mais en nous entendant arriver tu as dû paniquer et...
Pour la première fois devant mes yeux tu t'es transformée en cette... chose. Une créature démoniaque, assoiffée de sang. J'ai essayé de t'attaquer mais clairement je ne faisais pas le poids. Sous cette forme, que ce soit en force ou en magie tu me surclasses et de très loin. Je ne dois ma survie qu'à mon maître à l'heure actuelle.
Cet aspect de toi semble resurgir lorsque tu angoisses. Tu t'es donc retransformée aujourd'hui lors de "l'attaque" de Shulia croyant que tu étais menacée... Autant te dire qu'aujourd'hui encore je ne dois ma survie qu'à un miracle.

Je marquai une pause... Cette histoire semblait vraiment ridicule ! Et c'était la stricte vérité en plus...

Voilà je t'ai dit ce que j'avais à te dire...

Il y avait peu d'options. Soit elle me giflait pour avoir raconté de telles sornettes (et pourtant...) soit elle se retransformait et me tuait à coup sûr.
Mais quelque part, je préférais encore la mort que de perdre l'affection de la fille que j'aimais le plus au monde...

Plus ralyon parlait et plus je me sentais mal à l'aise. Pourquoi il me mentirait ?

Mes yeux s'embuèrent à l'idée de ce qu'il pouvait dire. Je ne voulais pas entendre.
Je me serrais contre lui « chut, ne dis rien, partons »

Mais il ne m'a pas écoutée, il a continué. Je n'étais pas préparée à ce qu'il allait dire.
J'essayais de l'interrompre « mais... ce n'étaient pas les guerriers de mon père qui... »

« Une créature démoniaque » Toutes les pièces du puzzle s'assemblèrent. Je comprenais tout. Pourquoi mon père n'avait pas voulu de moi à l’entraînement. Il disait que le pouvoir des ténèbres était l'essence même de la discipline. Il fallait maîtriser une force ayant sa propre volonté, qui était de vous dévorer de l'intérieur pour profiter de votre puissance.
On formait des êtres sans failles, durs comme de l'acier pour résister à une telle puissance intérieure.

Mais il avait compris que la bestialité et l'impulsivité de mon côté démon étaient incompatibles avec cette formation, et qu'ainsi je représentais un danger non négligeable pour le reste du village.
Ça, c'était le côté objectif de la chose, qui malheureusement était le moindre.

La chose qui comptait le plus était que j'étais le fruit d'un viol. Je représentais sa faute. Chaque minute que je vivais lui rappelait à quel point il avait échoué à protéger ma mère.

Il m'avait jugée incapable de contrôler mon pouvoir, et par sa faute je l'étais devenue.

J'avais failli tuer Ralyon. J'avais failli tuer l'étranger pale.

Toujours dans les bras de ralyon, je pleurais. Tout ce qu'avait dit l'étranger pale était vrai. J'avais tout fait pour le conforter dans ses préjugés. J'étais dangereuse. Je ne pouvais pas rester avec ralyon. Je le mettais en danger chaque minute.

Je m'écartais doucement de lui. « Avant que l'étranger pale n'arrive, je voulais te dire quelque chose. Durant tout le temps qu'on a passé ensemble je me suis beaucoup attachée à toi, tu m'as protégée malgré tout ce que je t'ai fait.
Tu savais ce que j'étais mais tu m'as acceptée... » Je me rapprochais en lui caressant la joue.
Nos visages étaient de plus en plus proches, attirés par une étrange force.
Nos lèvres se rencontrèrent alors, pour ne plus se quitter. Ralyon entoura ses bras autour de moi dans une étreinte puissante. Je me sentais chez moi dans ses bras, j'étais réconfortée.
J'écartais alors avec peine mes lèvres des siennes pour lui murmurer je t'aime.
Il m'embrassa alors plus fougueusement, et des frissons de plaisir me parcoururent. Il n'y avait que nous à cet instant.

Plus je voyais ses yeux s'embuer plus je regrettais ma décision... Elle commençait déjà à s'écarter de plus en plus. Pas parce qu'elle me haïssait... Mais parce qu'elle avait peur. Peur d'elle même. Peur du mal qu'elle avait fait et qu'elle pourrait faire.

Avant que l'étranger pale n'arrive, je voulais te dire quelque chose. Durant tout le temps qu'on a passé ensemble je me suis beaucoup attachée à toi, tu m'as protégée malgré tout ce que je t'ai fait.
Tu savais ce que j'étais mais tu m'as acceptée...

Et alors qu'elle semblait encore s'éloigner davantage quelque chose de curieux se produisit. Elle se rapprocha de moi et commença à me caresser la joue. Je sentis mon visage se rapprocher peu du sien, lentement, inéroxablement, comme guidé par une force mystérieuse...
Et au moment où mes lèvres croisèrent les siennes le temps sembla s'arrêter...
Pour la première fois de ma vie je me sentais comblé. J'aurais souhaité rester ainsi contre elle toute ma vie tant ce moment était magique...
Et quand elle s'éloignait pour me murmurer des mots doux, je la rapprochais de moi pour l'embrasser plus passionnément encore...

Je ne saurai dire combien de temps cela avait duré. Mais finalement nous nous arrêtâmes... Je la tenais contre moi, ma tête contre la sienne, lui glissant parfois un baiser...

Je t'aime Annaë... Et je t'aiderai à faire face. Tu n'es pas un monstre : n'en doutes jamais et ne laisse personne te persuader du contraire. Je ne te laisserai pas toute seule... plus jamais

Je n'étais guère pressé à la perspective de l'amener à l'école, sûrement encore moins qu'avant. Fatalement nos routes allaient se séparer... Et je ne le voulais pas. Aujourd'hui encore moins qu'hier...
Mais après tout je savais que cette séparation ne serait que momentanée car une évidence s'imposait à présent : l'école d'Ernelzya allait être une de mes étapes régulière au cours de mes voyages  

Et comme l'avait dit un jour grand sage : "Peu m'importe la distance tant que je sais que je vis dans ton cœur..."

Les paroles de ralyon me touchèrent beaucoup.Emportée par l'émotion, je l'embrassais doucement sur les lèvres. Serrés étroitement l'un contre l'autre nous ne faisions plus qu'un.
Le baiser se fit plus intense, et je caressai les cheveux de ralyon. Instinctivement je me collais à lui, avec des frissons de plaisir, dans l'attente de quelque chose d'inconnu.
Mais je sentis que c'était impossible.
Je libérais mes lèvres pour lui chuchoter « je dois vraiment aller à cette école... Ainsi plus personne n'aura le droit de dire que je suis un monstre. Je dois apprendre à maîtriser mes pouvoirs..
Mais d'abord... embrasse moi encore »

Ralyon ne s'est pas fait prier. Nous sommes partis un peu plus tard.

[fin du rp]