Commençons par le commencement

Le commencement, et bien, le commencement de quoi? Bien évidemment en supposant que vous voulez savoir le balbutiement d’une chose; d’un objet. Il serait ingrat de définir une personne comme étant un objet. Dans ce cas, je crois que le mot « personne » n’est pas approprié. Alors pourquoi pas humanoïde? Non, ce n’est pas mieux. C’est presque du raciste, dire qu’il faut avoir une forme semblable à un être humain pour être considéré différent d’un simple objet. Ah! J’ai trouvé : être vital. Donc ce n’est pas de « quoi », mais bien de « qui ». Ceci serait logique, qui veut vraiment connaitre le commencement d’une chaise.

Bien, je crois. J’imagine que cette question implicite me revient. Cependant, j’ai une question pour vous. Quel commencement? Exact, vous voulez le début de ma journée d’hier? Si c’est ce que vous recherchez comme information, vous allez être déçu. Ma journée a été très monotone et ennuyeuse. Ce n’est pas ce que vous voulez entendre. Dans ce cas, précisez! Par définition, le mot « commencement » signifie le premier moment de quelque chose. Quelqu’un peut m’expliquer ce qu’est une chose. Désolé, je crois que je m’égards du sujet principal. Je disais donc le premier moment de quelque chose. Je suis certain que vous pouvez m’énumérer une quantité étonnante de premiers moments que vous avez vécus. Comprenez-moi, vous me demander de commencer par le commencement sans spécifier une signification temporelle. Il est tout à fait normal que je ne sache pas quoi dire. Ah! Vous voulez connaitre mon histoire. Voyiez, ce n’était pas compliqué.
 
Le vrai commencement

Le commencement de ma vie, moi Marrick. C’est bien la première fois qu’on me demande de parler de moi. Normales, les croyances sur la naissance d’un hybride sont toutes les mêmes. Avant toute chose, ce serait beaucoup trop étrange si je parlais de moi à la troisième personne, d’autant plus que je ne suis pas barde ou troubadour. Si cela avait été le cas, j’aurais pu parler de moi à la troisième personne en substituant mon vrai nom à quelque chose d’un peu plus bourgeois. Un peu comme ça : « Makessia Krystaleen, l’ombre de la grande Ange Krystaleen. L’orphelin renégat porteur du plus grand secret que ce monde aurait connu. Un secret qui a le pouvoir de changer la face de ce monde à tout jamais ». J’envie les bardes en ce moment… Ce n’est pas comme si j’avais fait quelque chose d’héroïque qui mériterait des éloges. C’est juste que je me demande parfois la sensation que peut provoquer ce genre de chose. Oui, le sujet principal : moi. Euh, il me semble que ceci sonne un peu narcissique à mon oreille.
Le commencement de tout… Je pense l’avoir déjà mentionné par inadvertance, je me nomme Marrick Velichansky et je suis ce que les gens appellent un hybride. Je ne suis ni un elfe de souche ni un humain de souche, mais bien l’union des deux. Ce qui implique quatre possibilités : le meilleur des deux mondes, le pire des deux mondes, le meilleur elfique ainsi que le pire de l’humain et vice versa. Une chose est cependant certaine, la perfection n’existe pas et si nous existons c’est pour une bonne raison. Il ne peut pas y avoir que du vice en nous. Dans cette perspective, il ne reste que deux possibilités très similaires.
Passons à la naissance maintenant. Je vais tout de suite briser ce stupide stéréotype sur les hybrides. Oui, les hybrides sont des bâtards, mais je préfère de loin le terme « enfant de l’amour ». Les rapprochements entre 2 races ne sont pas nécessairement haineux et vicieux. Alors, pourquoi utiliser ce mot : bâtards. Il a une signification sale et répugnante comme si la personne ne devrait pas exister, mais si le mot est employé c’est pour une bonne raison. Tant qu’il y aura de la lumière, il y aura toujours une roche pour faire de l’ombre.

Pardon. Je n’ai jamais été un bon raconteur; j’ai tendance à dévier du sujet principal. Je suis né dans une petite cabane au cœur de la forêt […]. Pour ceux qui se demandent qui de mon père ou de ma mère a le sang elfique, laisser vous dire que ceci est complètement sans importance. Tout ce qui est important c’est que mes parents s’aimaient et que leur relation était tolérée dans les deux camps, voilà tout.
 
Une histoire de magie

Les années sont passées rapidement dans cette forêt. En fait une petite partie de ma jeunesse. Mes parents étaient mes mentors. Mon père me montrait le travail manuel comme l’art de la chasse, le tannage ou encore la survie en forêt. Ma mère s’occupait plus de mon intellect. Elle voulait ouvrir mon esprit sur le monde, les langues, les bonnes conduites. Par exemple, en me récitant des contes de plusieurs cultures différentes. Ces moments sont encore ancrés très profondément dans ma mémoire, car ce sont eux qui ont fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Prenons un moment pour réfléchir sur ce que vous savez en ce moment. Voulez-vous bien? Je suis un demi-elfe, donc un de mes parents à une longévité incroyable et l’autre et bien ne pourra pas voir son enfant devenir adulte et avoir des petits enfants. Forcément, l’un d’eux va mourir sous peu dans l’histoire. Effectivement, j’y arrive.

Un jour, mon père, reçut une lettre d’un village elfique. Celle-ci, le convoquant pour une raison qui m’est encore inconnu à ce jour? Par son visage ennuyé, ceci semblait important. Cependant à 90 ans, il était difficile pour lui de marcher. Je me souviens très bien de ce jour, mère avait décidé de l’accompagner. Ils étaient partis très tôt, le soleil commençait à peine à laisser entrevoir des lueurs orange prouvant son ascension vers le ciel. Pour éviter de devoir faire marcher mon père, ils avaient attelé une charrette. J’étais censé être encore dans le monde des rêves, mais mon père avait fait un tel vacarme lorsqu’il descendit les marches d’escalier qu’il m’était maintenant impossible de me fermer l’œil. Il fallait tout de même que j’attende silencieusement dans le lit qu’il soit hors de vision avant de me lever.

Le moment venu, je sautai de mon lit, je pris possession de mon arc et parti à la chasse. Je voulais impressionner mon père. Lorsqu’il allait être de retour, j’allais avoir préparé le meilleur ragout de lapin de monde entier. Ah! C’est beau l’esprit d’un jeune. J’y vais peut-être un peu trop en détail pour cette journée. Peu importe, je ne peux plus reculer. Autant vous endormir pour de bon avec une explication détaillée inutile de cette journée. Donc, je gambadais joyeusement dans la forêt. Le petit gibier était si facile à capturer alors pour quoi se forcer à être silencieux. En fait, c’est pour une raison assez étonnante quand on y pense deux secondes : pour ne pas alerter les plus gros prédateurs. Est-ce que j’en ai rencontré un? Non. La chasse s’est très bien déroulée. Je dirais même sans anicroche. J’ai même réussi à enchanter par inadvertance ma première flèche magique en voulant tuer un petit faisant. Le coup était si puissant que le corps de l’oiseau a explosé. Je crois que je n’avais pas ri autant depuis la fois que ce même animal avait été assez gourmand pour aller picorer les épices du morceau de viande placé sur le piège à ours. Il est étrange de savoir à quel point certains animaux sont si intelligents à un certain moment et si bêtes à un autre. Les humains en sont un bon exemple : place un nombre d’hommes en groupe avec un peu d’alcool et 2 secondes plus tard, ils vont se mettre à joueur à qui peut uriner le plus loin. Si vous voulez mon avis, ce jeu est ridicule et bizarre. D’autant plus qu’ils sont très faciles à battre. Où en étais-je? Oui, tout ça pour dire que je venais de trouver mon affinité magique : le vent. C’est plutôt pratique pour un chasseur d’avoir le vent comme connaissance magique.
 
Pour mes parents, c’est vrai! Ils étaient partis vers le village. En soirée, la charrette revint vers la maison sauf qu’il n’y avait qu’une ombre humanoïde qui la surplombait. Quand mère fut à ma portée, j’ai remarqué qu’elle pleurait, mais elle souriait. Ce n’était pas des larmes de tristesse. Je ne comprenais pas trop les émotions qui traversaient le doux visage de ma mère. Je restai là à attendre qu’elle dise un mot. N’est-ce pas la politesse de laisser une dame pleurer? Si mes connaissances sont exactes, ma mère fait partit de ce groupe de personnes. Elle avait fini par dire quelques mots. « Je suis navré, mon petit Marrick, ton père n’a pas survécu au voyage d’allée. Finalement, il a été accepté. Tu n’as pas à le pleurer, soit en fier. Bon qu’est-ce que tu as rapporté pour le repas? […] ». Bien évidemment, j’ai pleuré la mort de mon père. Néanmoins, je ne peux pas vous mentir. Je savais qu’il ne lui restait plus beaucoup de temps et mes parents m’avaient préparé des années à l’avance. Il est mort heureux et en paix selon ma mère. Je n’avais besoin de rien de plus pour être content.

À partir de ce moment, je suis devenu un jeune enfant élevé seulement par sa mère, vous pouvez imaginer le genre d’homme résultant. Non, et bien tant pis, ce n’est pas mon problème. Cependant, une chose m’intrigue. Est-ce qu’il existe un lien entre être élevé par sa mère et être mal à l’aise en présence d’une autre demoiselle? Les chances sont minces, c’est juste dans ma tête. Ma tête! Je commence à être fatigué moi.

Et maintenant

Je vais couper un peu sur la suite. Pendant les 30 années qui ont suivi, je n’ai fait que continuer dans la routine qui s’était installée depuis ma naissance. Soit la chasse le matin et des cours privées à la maison en après-midi. Je commençais à être fatigué de cette vie et ma mère aussi. Elle voulait que je vole de mes propres ailes. L’idée était intéressante. Enfin, j’avais la possibilité de visiter le monde. Donc voilà, c’est à peu près tout ce que j’ai à raconter. Vous pouvez facilement imaginer la suite. Par exemple, la première fois que j’ai entrée dans une ville; le pire traumatisme de ma vie. J’avais l’impression que tout le monde voulait me tuer. Il y avait juste trop de gens. Je pouvais me faire attaquer à n’importe quel moment, me faire voler ou pire enfermer dans une prison. Je me souviens d’avoir crié haut et fort : « Laisser moi de l’air je vous en prie » avant de tomber en position fœtale sur le sol. C’était la seule façon d’être en sécurité. Bon, je dois l’avouer, je suis peut-être agoraphobe et claustrophobe.

Sans entrer dans les détails, je n’ai jamais vraiment aimé les grandes villes, c’est le résultat d’une belle jeunesse à vivre isolé dans la forêt. C’est pour cette raison que j’ai décidé de devenir chasseur de démon. Je n’ai malheureusement rien contre les démons, mais je les chasse. C’est le meilleur métier au monde pour voyager et comme vous aviez probablement remarqué mes talents de raconteur sont loin de pouvoir animer une foule. De plus, je commence à l’heure que je veux et je peux même prendre le nombre de jours de congé que je veux. Tout dépend du poids de ma bourse, mais ce n’est qu’un détail. Il y a toujours une façon de s’arranger comme on dit.
Je crois que je vais aller dormir. Peut-être que demain je pourrais parler du commencement…